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Confusion chez Confucius

A CONFUCIAN CONFUSION (Confusion chez Confucius)

Edward Yang, 1994

avec
Wang Bosen .... Akeem
Shiang-chyi Chen .... Qiqi
Yiwen Chen .... Liren
Danny Deng .... Larry
Yan Hongya .... Molly's brother-in-law
Elaine Jin .... Auntie
Richie Li .... Feng
Chen Limei .... Molly's sister
Ni Shujun .... Molly
Wang Weiming .... Ming
Wang Yeming .... Birdy

Difficile de ne pas voir dans ce film d'Edward Yang une sorte de brouillon de Yi Yi. Comme ce dernier, Confusion chez Confucius est une chronique de la vie d'habitants de Taipei. Si Yi Yi s'intéressait à toutes les générations, Confusion chez Confucius se limite aux relations professionnelles et amicales d'adultes entre 30 et 40 ans. Et se concentre sur le thème plus particulier des relations entre artistes et cadres.

Dès le début, Confusion chez Confucius demande un effort d'attention afin de faire face à la multitude des personnages qui font irruption à l'écran. Il faut de plus saisir les relations entre eux. Mais si la première demi-heure peut apparaître confuse, on apprend graduellement à reconnaître et à connaître les différents protagonistes pour finalement se plonger totalement dans leur univers.

 

Confusion chez Confucius est le titre d'un essai qu'écrit un des personnages. Il donne le ton du film qui se veut comme un essai sur la vie d'habitants de Taipei comme le prouve les maximes sous forme de cartons qui viennent régulièrement s'insérer entre les scènes. Mais c'est aussi est surtout exactement le sentiment de Yang lorsqu'il regarde ses compatriotes. Comment, en seulement vingt ans, un village comme Taipei a t-il pu devenir une des villes les plus économiquement dynamique et puissante ? Cela n'a pas pu aller sans conséquences sur les gens qui ont participé à ce boom. Edward Yang, qui est de la même génération que les personnages de son film sait très bien de quoi il parle. Venu au cinéma sur le tard, il fût d'abord ingénieur. Il est donc dans une position idéale pour décrire comment d'un côté les artistes et de l'autres les véritables acteurs économiques se positionnent par rapport à cette prouesse économique mais également comment leur vie privée a t-elle pu être affectée par un investissement énorme dans le travail ou une non reconnaissance sur le plan artistique.

Les personnages tels qu'on les retrouve dans Confusion chez Confucius sont tous sans exception confrontés à des problèmes à la fois professionnels et personnels. Les couples ne se supportent plus car soudain, avec le temps retrouvé et mis à mal par leurs problèmes, ils s'aperçoivent qu'ils ne se sont jamais véritablement regardés. Aveuglés par leur égoïsme, il n'ont pas réussi à se construire un avenir à deux et les conflits éclatent. Conflits qui marquent également celui de deux catégories professionnelles : les artistes et les cadres, avec plusieurs couples professionnellement mixtes.

Cette incapacité à voir chez l'autre au delà de l'image qu'il renvoie est particulièrement criant avec Qi Qi toujours tout sourire. Le recours à limage télévisée comme métaphore de cette apparence trompeuse (Qi Qi a joué dans une publicité), Edward Yang l'utilise à plusieurs reprise. Les artistes sont confrontés à la question de leur utilité en tant que créateur de biens culturels mais non productifs au sens le plus archaïque du mot. Si les cadres, confrontés à des difficultés professionnelles regrettent d'avoir autant consacré de temps à leur activité professionnelle, les artistes regrettent que justement, ils aient été absent de ce qui a permis de faire la puissance actuelle de Taiwan. Ces doutes, ces questions se traduisent dans les relations privées comme professionnelles.

Enfin, tous doivent faire face à une absence de passé historique et qui est le propre de tous les taïwanais qui n'ont pas connu une véritable vie en Chine continentale. Cette absence est parfaitement traduite lorsque l'un des personnages, pour décrire une femme, évoque un passage de A Chinese Ghost Story de Tsui Hark. Le film représente alors l'histoire d'un pays. Le plus curieux étant que le film est de Hong Kong dont le point de vue est finalement plus proche des taïwanais que des chinois de Chine continentale. Comme Hong Kong à une époque, Taiwan est dans une position particulière et les personnages évoquent régulièrement les diverses possibilités futures. De l'hypothétique reconquête issue de la propagande gouvernementale à l'exemple de Hong Kong (une Chine, deux systèmes).

Formellement moins impressionnant que Yi Yi, Confusion chez Confucius reste un magnifique travail sur la photographie, les tons de couleurs et n'en porte pas moins un regard cru (mais pas cruel quoique non dénué d'une certaine ironie) et réaliste sur une partie de la société taïwanaise et les contemporains de Edward Yang. Il tente de comprendre une génération qui doute et se questionne sans relâche. Un film superbe pour qui est curieux de mieux comprendre Taïwan.

© Décembre 2000