Navigation Cho-Yaba

 

Cinema
Chroniques

Warning: Cannot modify header information - headers already sent by (output started at /mnt/116/sdb/a/4/zeni/acz/cinema.php3:4) in /mnt/116/sdb/a/4/zeni/acz/chroniques/films/tellme.php3 on line 10
Tell me something

TELL

Yoon-Hyun Chang, 2000

 

 

avec Han Suk-kyu, Shin Eun-ha, Jang Hang-Seon,.

Brian Addav / Zeni


Brian Addav : Et encore une magnifique surprise nous arrivant tout droit de la Corée de Sud! A se demander si les réalisateurs coréens n'ont pas décidé de reprendre le flambeau du cinéma de HK pour mieux le montrer à la face du monde!

En premier lieu, ce film a tout du film de genre hollywoodien. Calibré, grosses ficelles apparentes, acteur vedette (celui du très bon Shiri), tension, suspens, réalisation sobre, sans esbroufe, si ce n'était la présence de quelques membres humains, et d'une scène de chirurgie assassine qui justifient son classement catégorie 3 (et encore!).

L'histoire commence ainsi. Pièce sombre, une ombre, et un corps posé nu sur une table d'opération. Une morgue? C'est ce que l'on pourrait croire jusqu'à assister à la découpe chirurgicale du bras gauche de la personne suscitée... Au moins on est dans l'ambiance d'entrée de jeu... Introduction du personnage principal, le Détective Cho, joué donc par Suk-Kyu Han. Réputation ternie par une affaire de semblant de pot-de-vin lié à la mort de sa mère, ce dernier se retrouve avec une sale affaire sur les bras: quelqu'un s'amuse à laisser au hasard dans la ville des cadavres en pièces détachées... Qui plus est en mélangeant les membres des victimes... et en laissant les morceaux traîner un peu partout dans la ville, affolant la population...

Pour corser le tout, les victimes, des hommes, sont découpées vivantes, Inconscientes (heureusement ?)... Rapidement, notre héros découvre un lien entre toutes les victimes: elles furent toutes l'amant d'une jeune fille, Chae. L'enquête va pouvoir prendre une autre dimension...

Hors de question pour moi de vous dévoiler la suite de l'histoire. Sachez juste que vous y retrouverez les grosses ficelles habituelles de ce genre d'histoire: traumatisme de l'enfance, révélations à tiroirs, fausses pistes... Le tout filmé comme un classique des grosses productions hollywoodiennes, l'enquête policière, le début de romance entre les deux protagonistes, le coéquipier sympathique, une bande-son faisant appel aux tubes de l'indy pop (Placebo, Nick Cave). Bref, on vraiment l'impression d'avoir affaire à une grosse machine faîte pour l'export. Ce serait surprenant de ne pas voir ce film sortir en salle chez nous ou ailleurs dans le monde occidental, tellement il est universel...

Au premier abord, une telle universalité pourrait nous faire peur, et surtout donner lieu à une de ces séries B que le cinéma US sait nous fournir pour ce genre d'histoire... Quel est le plus? Comme de mise dans ce nouveau cinéma coréen, c'est la caractérisation des personnages et de leurs métiers tout d'abord. A l'instar de Shiri, la peinture du travail de la police est très bonne, avec les bons côtés (nouvelles technologies, efficacités); les mauvaises, (jalousie interne, réputation ternie..). Les personnages , aucun n'est oublié, chacun est traité avec sérieux. Même les secondaires ont droit à un effort de la part du scénariste. Nous suivons de près Chao dans son enquête, dans ses interrogations. Ses certitudes, ébranlées tout au long de l'histoire, ses convictions mises à mal. Noyé au milieu du mal, il va essayer de survivre, et surtout de faire son devoir.

En dernier lieu l'ambiance. Il pleut beaucoup. Un climat sombre, humide, tortueux. Peu de scènes d'actions "esbroufe", même aucune d'ailleurs. Juste un jeu sur le rythme, pour préparer, faire monter la tension, la faire retomber, pour mieux la relancer. On accroche complètement, et on croit s'en être sorti quand le dernier coup nous achève pour de bon... Et on se dit après coup qu'on nous avait bien prévenu pourtant …[Note : 4 dans le genre Thriller avec Serial-Killer]

Zeni : Et encore un film coréen et encore Han Suk Kyu. Deux raisons de se réjouir puisque Han Suk Kyu est l'acteur principal de plusieurs excellents films coréens (Christmas in August et Shiri, notamment) dont nous avons eu l'occasion de vous parler ici même.

Le détective Cho (Han Suk Kyu) confronté à des problèmes professionnel et personnel se retrouve chargé d'une enquête qui doit pouvoir, s'il la résout, lui donner une chance de se racheter. L'enquête s'annonce difficile, le mobile des meurtres étant aussi mystérieux qu'ils sont horribles. Des morceaux de corps ou des corps reconstitués à partir de morceaux de différentes victimes sont retrouvés dans des lieux publics de Séoul, provoquant une panique dans la ville. Les victimes apparaissent toutes liées à une certaine Chae (Shin Eun-ha) dont ils étaient tous l'amant. Et Chae semble cacher un lourd secret que le détective Cho aimerait bien découvrir afin de résoudre au plus vite cette enquête qui prend des proportions inquiétantes.

Tell Me Something est donc un film policier et plus particulièrement de Serial Killer. D'une structure assez conventionnelle (un détective traque un tueur en série dont le spectateur ne connaît pas non plus l'identité), il est assez proche par la crudité de certaines scènes de Le silence des agneaux comme en témoigne la scène d'ouverture où l'on voit le tueur découper au scalpel le bras d'une victime. Mais le ton apparaît nettement plus proche du japonais Cure de Kyoshi Kurosawa, sans l'aspect fantastique.

Le film se déroule principalement la nuit et sous la pluie donnant une atmosphère glaciale, renforcée par des intérieurs modernes et vastes ou des extérieurs urbains (une autoroute la nuit, un ascenseur, un terrain de basket …). A l'image de cette ambiance, on trouve le personnage distant de Chae dont la personnalité mystérieuse et complexe ainsi que le passé sont petit à petit mis à jour et pénétrés par le patient détective Cho. A l'exception des policiers, la plupart des personnages et notamment les suspects semblent tous jouer un double jeu ne laissant apparaître que ce qu'ils veulent, une personnalité artificielle de surface, comme un masque (Seungmi l'inquiétante meilleure amie de Chae, par exemple). Mais Cho, plongé dans l'enquête et pressé par les événements n'a pas le temps de briser les faux-semblants, comme il pourrait le faire des images que l'on voit se refléter à plusieurs reprises au cours du film sur un téléviseur, dans un rétroviseur. Car l'image (en tant que reflet, représentation biaisée de la réalité) revêt une grande importance dans Tell Me Something où le tueur est filmé par une des caméras omniprésentes partout dans la ville mais reste insaisissable. En dépit de ces milliers de caméras de surveillance qui scrute sans cesse la ville, l'enquête piétine. Tout comme chacun peut ne dévoiler à autrui que ce qu'il veut, les images des caméras ne donne une vision que superficielle de la réalité et leur interprétation est multiple, fonction du spectateur. L'importance donnée à la représentation du réel sous diverses formes apparaît également par le métier du père de Chae, un artiste peintre et par les indices issus souvent d'une photo ou d'un film.

Servi par des acteurs magnifiques, Tell Me Something est un très bon film de tueur en série, inquiétant et passionnant jusqu'au bout et bénéficiant d'une mise en scène parfaite. En s'attachant principalement aux personnages et à l'enquête en soi, Yoon-Hyun Chang n'évite cependant pas tout à fait le piège de ce genre de films qui perdent une grosse partie de leur intérêt une fois l'identité du tueur dévoilé. Il reste que pendant presque deux heures, on a le droit à un policier noir et glacial, à l'atmosphère inquiétante à souhait, le soleil n'apparaissant que tardivement, comme l'aube se levant sur un jour nouveau mais qui ne signifie pourtant pas que tout est résolu.