Torture

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Plongeons nous dans la Chine de la dynastie Ching, époque bénie où la torture était visiblement un moyen courant pour obtenir des aveux. Et les préjugés que l'on pouvait avoir sur le sadisme des bourreaux chinois semble être confirmés par ce film. Bosco Lam prend donc ici l'excuse d'un procès pour exposer diverses méthodes de torture de l'époque. Et comme visiblement, les pauvres accusés ne pouvaient pas en supporter plus, le film s'ouvre sur une présentation rapide et gore de quelques procédés parmi les plus extrêmes (castration, scalp intégral, amputation des jambes…) à la manière d'un documentaire. Une fois cette mise en condition faite (nous voilà prévenus!) le film commence pour de bon. Après la découverte de "Petit Chou" (Yvonne Yung) couverte du sang de son mari qui gis à ses cotés, celle-ci est accusée de meurtre et d'adultère ainsi que son amant présumé, le Dr. Yang (Lawrence Ng). Le procès commence et, par l'intermédiaire de retour en arrière, la vérité est peu à peu dévoilée. En fait, le Dr Yang, séduit par la petitesse des pieds de "Petit Chou" (PC), engage celle-ci comme domestique avec l'intention d'en faire sa concubine. Elle fait connaissance avec la femme du Dr. Yang (Ching Mai, The Underground Banker), la sœur de ce dernier qui a des tendances lesbiennes, ainsi qu'une nurse ayant comme particularité d'être plate comme une planche à pain ce qui donne l'occasion à quelques remarques fines dans la tradition comique cantonaise. Mais peu de temps après que "Petit Chou" ait été engagée, ses parents sont sauvagement assassinés par un brigand ayant appris le montant confortable du salaire touché par "Petit Chou". Ceci n'est qu'une astuce de scénario pour que PC se voit alors proposer par le Dr. Yang de vivre dans sa demeure. Elle accepte, ce qui aiguise la jalousie de la femme du docteur. Ce changement de situation lui permet également d'assister aux ébats particulièrement torrides du docteur et de sa femme avec utilisation d'accessoires de l'époque qui sont un peu au sexe ce que les instruments de torture sont à la souffrance. Ces retours en arrière viennent entrecouper le déroulement du procès dont l'intérêt principal et de présenter à chaque fois un nouveau mode de torture que subit soit "Petit Chou" soit le Dr. Yang. Jusqu'au jour où le Dr. Yang part pour un voyage d'affaire. Au cours de ce voyage il rencontre un couple qui outre le fait de se battre à l'épée, pratique l'équivalent dans leurs relations sexuelles (la femme est la peu farouche Juliet Lee Wah, spécialiste des rôles déshabillés : Trilogy of Lust). Ce qui donne lieu à une joute sexuelle en tout point semblable à un combat se sabre habituel entre deux adversaires (utilisation de "coups" particuliers) mais détourné sous forme de relation sexuelle. Témoin de cette scène, le Dr. Yang se fait du couple des alliés qui lui apporteront leur aide plus tard. Pendant ce temps, sa femme en profite pour avoir une relation avec un autre homme qui n'est autre que le fils du juge chargé du procès. Relation dont PC et l'autre domestique sont témoins. Afin d'éloigner PC, la femme du docteur arrange la mariage de PC avec un homme du village ayant la particularité de posséder un sexe d'une taille telle qu'elle l'empêche d'avoir toute relation sexuelle avec une femme. La très prude et innocente PC est terrorisée à l'idée d'avoir une relation sexuelle avec son mari mais celui-ci est en fait très conscient de son problème et on découvre un homme bon qui souffre de sa particularité comme d'un véritable handicap. Il se lie peu à peu une véritable histoire d'amour entre les deux époux. Malheureusement, l'amant de la femme du docteur est bien décidé d'abuser de PC et fait appel à un sorcier pour devenir invisible puis, dans cet état, s'en va tenter de violer PC. Il n'y parviendra cependant pas du fait de la combativité de PC et de l'intervention de son mari qui, désavantagé par le fait de ne pas voir son adversaire, est sévèrement battu. Il est soigné par le docteur Yang dont la femme intercepte l'ordonnance et y ajoute une dose mortelle d'aphrodisiaque en voyant là un moyen de se débarrasser des époux qui en savent un peu trop. Pensant prendre un médicament, le malheureux époux de PC, se voit pris d'une envie frénétique de faire l'amour et, plus prosaïquement, de se "décharger". Malgré tout les efforts et l'aide que lui procure PC, celui-ci décède suite à l'explosion de ses organes sexuels. Le juge, qui est en fait au courant de la triste réalité, condamne PC et le Dr. Yang à mort après avoir manipulé ou torturé les témoins récalcitrants ou dissimulé des preuves. Mais grâce à l'aide de la nurse, la sœur du Dr. Yang, qui a découvert de nouvelles preuves, ainsi que du couple rencontré dans la forêt par le Dr. Yang, la révision du procès est obtenu et la lumière est faite sur cette affaire ce qui n'est évidemment possible qu'après avoir torturé le couple criminel pour obtenir leur confession.

L'excuse d'un procès permet bien sûr de porter à l'écran des scènes de torture parfois assez insupportables mais Bosco Lam y ajoute également de nombreuses scènes érotiques allant des relations torrides entre les différents amants à une relation lesbienne entre PC et l'autre domestique. Evidemment, ce n'est là que les recettes de base d'un film de catégorie III. Mais ce qui fait l'intérêt supplémentaire de ce film est certainement la manière dont il recycle des classiques du cinéma de HongKong sous une forme plus ou moins heureuse et souvent au détriment d'une intrigue confuse et chaotique. Par exemple, le combat auquel assiste le Dr. Yang fait immanquablement penser à A Chinese Ghost Story (la similitudes des titres également!) et à nombre d'autres films où figure ce style de combats aériens et survoltés. Bien sûr, par le biais de la parodie, Lam détourne ces références à la sauce sexuelle en y ajoutant quelques bruitages dont il aurait pu se dispenser inspirés des jeux vidéo de combats. Notons également qu'il utilise la musique emblématique de Once Upon A Time In China comme musique de fond lors du combat. Le passage où l'amant criminel se rend invisible fait évidemment référence à ce sous-genre du cinéma de Kung-fu, la comédie d'horreur à la Mr. Vampire. Enfin, il est difficile de na pas penser à Sex & Zen à qui Lam emprunte sans vergogne. Malgré ce mélange chaotique des genres pas toujours très judicieux ni très fin, certaines scènes sont particulièrement réussies. La scène où PC offre un geste d'amour à son mari par la masturbation est tournée de manière très codifiée certes, mais fait ressortir les véritables sentiments des personnages et apparaît comme un des rares moments calme et sincère du film. Evidemment, le final, le mari éjacule longuement tel un Kärcher contre un plat en cuivre, vient rappeler à quel genre appartient le film! Une autre scène que l'on jurerait inspirée de la scène finale de Baby Cart, l'enfant-massacre se révèle assez réussie. Il s'agit du passage où le sexe du mari de PC explose. Bosco Lam arrive à en tirer une scène graphiquement très réussi où l'on voit PC plongée dans un fin nuage de sang avant qu'un puissant geyser de sang jaillisse. Malgré un scénario totalement bordélique recyclant sans cohérence quelques classiques du cinéma hongkongais, le film arrive, par l'utilisation talentueuse des deux ingrédients indispensables à un film de catégorie III : le sexe et le sang, à se détacher du lot de la plupart des productions de ce genre.