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Voici donc le cinquième volet de cette série initiée et produite par le délicat Wong Jing et dont la numérotation et le titre des épisodes pourraient donner lieu à une thèse de doctorat. Car en fait, RBAA5 n’est pas une séquelle de RBAA4, comme on aurait pu légitimement s’y attendre, mais une séquelle de RBAA2 : The Uniform Fan. Soit un RBAA2 2. Vous suivez ? Car rappelons aux distraits que RBAA (le tout premier, avec Chingmy Yau) est en réalité lui même une séquelle du fameux Naked Killer de Wong Jing. A partir de ces renseignements, déterminez le titre et le numéro du prochain épisode. Car n’en doutons pas, en dépit d’un sous-titre trompeur, il serait étonnant de voir Wong Jing stopper une série financièrement rentable. N’oublions pas qu’à l’heure où j’écris ces lignes, on en est à Troublesome Night 11 ! Un rythme presque aussi fou que celui des Zatoichi à la grande époque. Mais tout cela est finalement sans aucune importance, les divers épisodes de RBAA n’ayant absolument aucun lien entre eux.

Le plus difficile va maintenant de faire plus bête et vulgaire que ce cinquième épisode. On ne peut pas vraiment accuser Billy Tang (quoiqu’il ait déjà commis Run & Kill ainsi que Red to Kill ou ... Sexy & Dangerous) d’être à l’origine d’une telle dérive, si on peut parler de dérive vu le passif. Wong Jing n’a pas besoin d’aide pour faire toujours plus vulgaire. Souvenez vous de ce piège consistant à provoquer le viol d’une sidéenne pour se venger d’un violeur dès le premier épisode ou des blagues douteuses sur le viol ou le sida qui émaillent l’ensemble de la série. En plus du machisme, du sexisme et de l’humour très en dessous de la ceinture, on aura reconnu sans mal la fameuse Wong Jing’s Touch.

Mais venons en à RBAA5, ou RBAA2 2, qui n’a de commun avec ce dernier qu’une histoire d’uniformes.

Mme Tong (Helena Law Lan), suite au viol de sa petite fille Laura, maintenant dans le coma, fait appel à cinq enquêtrices de choc afin de découvrir le coupable. Ces cinq " Charlie’s Angels " à la HK, sont toutes d’anciennes victimes de viols. Le groupe se compose de Nancy (Gigi Lai), leader et psychologue mentalement pas vraiment au top ; Nako (Kelly Lam), un greffier n’osant pas dévoiler ses pieds ; Pinky (Pinky Cheung), une vendeuse sans talent particulier ; Bonnie (Li Fei), une experte en Taekwondo et enfin, Moon (Anita Lee), qui passe son temps à se déguiser (elle est grimée en Sailor Moon lors de sa première apparition à l’écran).

Si Billy Tang n’est pas un manche, ce n’est cependant pas avec RBAA5 qu’il en apporte la preuve. En dépit d’une musique jungle du plus bel effet, avouons que les décors, tout comme la photographie, oscillent entre le ridicule et le besoin de prouver qu’à HK, il n’y a pas que Jingle Ma qui ne sache pas tenir une caméra. Refusant visiblement de faire de RBAA5 un film érotique, et bien que disposant là d’une matière première de choix, c’est sur l’humour mongoloïde et la vulgarité qu’il se rattrape. Car mis à part une vague scène lesbienne totalement parachutée, RBAA5 est très soft, visuellement parlant. En fait, ce n’est pas simplement un film érotique qui semble avoir voulu être évité, mais un film tout court.
En effet, tout idée de suspens est abandonnée très vite, en dévoilant l’identité du violeur après seulement quelques minutes.

Mais RBAA5 a trouvé la parade à l’absence de cohérence : faire toujours plus idiot, toujours plus vulgaire. Une recette wongjingesque, certes pas nouvelle, mais toujours diablement efficace. Du moins, tout dépend pour qui.
S’il nous dispense, une fois n’est pas coutume, des blagues sur le sida, le film apparaît comme une véritable entreprise de banalisation, de "vulgarisation", du viol. Donnant lieu à des scènes proprement hallucinantes. Une fête d’anniversaire se transforme ainsi en une exhibition des blessures que chaque membre du groupe a eu lors de son viol, chacun donnant lieu à un flashback. Pour vous donner une idée du ton, imaginez une réunion Tupperware ayant pour thème le viol. Ah, que de bon goût. Mais c’est loin d’être tout.
La fameux violeur, un fétichiste de l’uniforme (il aime se déguiser), apprécie tout particulièrement une tenue d’officier SS. On le voit ainsi claquer les talons en faisant le salut nazi avant de violer une pauvre victime. Il hurlera même faire parti de l’unité 731 ! Une référence plus que douteuse dont on se serait bien passé...comme toutes les autres.
Voilà pour la vulgarité. Niveau crétinisme, on a le droit à un piège final tiré par les cheveux, des scènes incompréhensibles dues à un montage étrange, des personnages féminins qui parlent de viol comme de cuisine et une psy capable d'avoir des "flash" en touchant les personnes.

C’est avec ce genre de films que l’on peut mesurer les différences culturelles (et notamment les tabous) entre les cultures occidentales et chinoises. N’écopant que d’une classification IIB, RBAA5 se révèle pourtant particulièrement outrageux. Car outre les références au nazisme, la banalisation du viol, le sexisme récurrent, il s’avère que le violeur est le propre frère de la victime, elle même une lycéenne ! Inceste, pédophilie, sida, viol, nazisme, ... il y a des sujets qui ne semblent choquer personne à HK. Il est vrai que du moment qu’il y a un profit à faire, mettre sa conscience de côté est bien plus pratique.

Avec ses allures de Ebola Syndrom sans effets gores, et même au 43ème degré, la pilule RBAA5 reste souvent difficile à avaler. A vous de voir, vous voilà prévenu.

© Mai 2001