Toru Yoneyama & Osamu Kato Luv Rokambo

      D'emblée, le duo Toru Yoneyama et Osamu Kato brouillent les pistes. Ou plutôt ne laissent-ils que de maigres indices. Aucun texte de présentation ne vient présenter ces deux inconnus, ce qui est fort regrettable. C'est seulement à l'écoute qu'on pourra dire que Luv Rokambo est avant tout un duo de guitares. "Avant tout" car sur la pochette green-oroco-g (?) et stratocaster prennent place au côté de divers ustensiles : toys, mobile, percussion, rapman le tout étant accompagné de temps à autre par la voix de l'un et de l'autre. Aussi, à l'écoute des première notes de How Are U?, on pourrait se croire dans l'univers bricolo-électro de Yuko Nexus 6 ou de Yasuhiro Otani. Pourtant des morceaux comme Tremolo Indicator ou Cosmic Elegy sont totalement construits, si l'on peux employer ce mot, autour des deux six cordes...Les différents gadgets ne servent finalement pas de cache misère comme on aurait pu le craindre -mais pour autant, il ne s'agit pas d'un disque de virtuoses. Tout semble fait pour éviter le choc frontal avec l'instrument : Toru Yoneyama et Osamu Kato jouent avec les larsens, le vibrato, ils tordent les cordes ou jouent du glissando jusqu'à plus soif...Et quand quelques notes s'esquissent, c'est avant tout pour parodier un riff blues rock graisseux.

      Sorti sur le jeune label de CDr Public Eyesore, ce Luv Rokambo manque peut-être un peu de maturité : le jeu de guitare n'est ni très maîtrisé ni très personnel, mais l'approche punk pallie ce manque. Dans une certaine mesure le duo peut faire penser à Eugene Chadbourne pour l'approche iconoclaste et le son brut, qui semble ici avoir été retravaillé en studio pour dépolir un écrin trop parfait. Comme dans un bootleg des Stooges, l'énergie et la fraîcheur priment par rapport au contenu qui, s'il est interessant, n'est pas toujours assez neuf pour être percutant. Toru Yoneyama et Osamu Kato montrent qu'ils osent, tout simplement...par exemple utiliser une boîte à rythme osbsolète dans How Dare U?, justement. L'énergie circule, libre, comme au travers de la voix de Cameroon, mais elle se perd aussi parfois comme dans ce Chicago moite, ennuyeux et trainant comme un dimanche après midi dans une grande ville. Il y aurait eu deux ou trois bonnes idées de plus, on aurait dit que le duo faisait de nécessité vertu...Luv Rokambo reste cependant un disque très attachant, où les douze cordes s'enroulent comme les arabesques de la pochette. Il suffirait d'un rien pour que ces pattes de mouches, cet usage trop insistant du vibrato ou des effets se transforment en gribouillis rageurs. Reste qu'il est toujours interessant de découvrir des artistes frais émoulus finalement très prometteurs et qui ne demande qu'à s'affirmer.

Cameroon

Chicago

Toru Yoneyama & Osamu Kato Luv Rokambo, Public Eyesore #32 2001.

Florent, Juillet 2001